Interview – Nathalie Mauclair

Elle a tout remporté: double vainqueur de la Diagonale des Fous, UTMB, Ultra Marin, double championne du monde de trail et excusez du peu: 3ème de deux courses légendaires américaines, la Hardrock 100 et la western States Emoji

On ne présente plus Nathalie Mauclair……enfin si, juste pour le 37kms du Trail TKAL car le défi n’est pas pour elle, qu’elle nous a dit Emoji

Comment décrirais-tu ton parcours en quelques mots ?

Je dirai que je suis passée de non sportive à sportive et j’ai tellement pris de plaisir que je suis devenue sportive de haut niveau. J’ai commencé à courir le jour de mes 40 ans sur un marathon sur proposition d’un ami. J’ai découvert que mon corps, ma tête aimaient beaucoup ça, que j’avais des capacités et que je pouvais encore progresser.

Quel a été le déclic pour te lancer dans le trail, et qu’est-ce qui continue de te motiver aujourd’hui ?

Le déclic: j’ai fait deux à trois années de VTT, du coup, j’aimais beaucoup la nature d’autant plus que j’ai des origines agricoles, j’ai toujours vécu dans la nature, c’était donc un vrai plaisir de me retrouver sur les chemins plutôt que sur du bitume. Et c’est encore ce qui m’anime aujourd’hui: aller découvrir des paysages, être en harmonie avec la nature.

Si tu devais choisir un moment clé de ta carrière, lequel serait-ce et pourquoi ?

Tes victoires, les meilleurs moments sportifs ?

Il y en a plusieurs. Bien entendu, les meilleurs sont liés à des victoires, alors que j’ai, aussi, passer de bons moments en dehors de ces challenges mais c’est vrai que ces victoires apportent un plus sur une compétition. Le premier moment clé, c’est mon premier championnat du monde en 2013 au Pays de Galles avec un circuit de 15kms à faire 5 fois. J’arrive là sans connaitre vraiment mon niveau et je termine en tête avec pas mal d’avance sur les autres. J’étais plutôt étonnée. Après, il y a eu la Diag la même année, mon premier ultra. Je n’avais couru, comme plus longue distance, que le 120 kms de la TDS et j’arrive à la Réunion avec l’envie de faire du mieux possible et je termine 1ere. Là, je découvre vraiment ce qu’est un ultra: au delà de l’effort sportif, c’est tout ce grand nettoyage mental que toutes ces heures seule en montagne, le parcours m’apportent. C’est, en partie, grâce à ça que je suis devenue adicte aux ultras. Ensuite, il y a eu les 2e championnat du monde à Annecy. je m’étais bien préparée car c’était en France même si je me disais que la victoire serait pour une montagnard mais au final c’est moi la Sarthoise qui l’emporte avec seulement 2’ d’avance sur Caroline Chavrot. Un souvenir que je n’oublierai jamais, ayant mis toute mon énergie dans la dernière descente pour finir. La dernière grande victoire est l’UTMB en 2015. Là aussi, je me dis que cet ultra est réservé aux montagnards et au final, je l’emporte. Je n’oublie pas toutes les autres expériences aux U.S, en Afrique du Sud….

Pour toi, l’esprit trail, c’est quoi ?

C’est courir en nature, adapter sa préparation, son corps, son mental pour une compétition sportive, c’est ne pas tenir compte du chrono, aider l’autre, avoir de la fraternité, de la convivialité et je dirai que ça évolue depuis que j’ai commencé: il y a de plus en plus de monde donc moins rare, ça se généralise davantage et on perd un peu de l’essence de l’esprit initial mais je suis ravie qu’il y ait autant de coureurs maintenant en trail et que les gens viennent se faire plaisir sur les chemins.

Qu’est-ce qui t’attire dans le trail TKAL et qu’attends-tu de cette expérience ?

Je ne suis pas souvent venu en Bretagne, j’avais fait le trail du bout du monde en 2010 quand j’ai commencé à courir. Là c’est sympa, ce qui m’attire dans le TKAL, c’est saisir l’opportunité de venir découvrir votre terrain de jeu puisque vous m’avez invité et c’est un peu symbolique car mon fils est étudiant à Rennes cette année.

 

Y a-t-il des figures (athlètes, proches, etc.) ou des événements qui t’ont inspiré dans ta carrière ?

Oui bien sur, le système du modèle est toujours intéressant pour progresser, aller plus loin. Du coup, quand j’ai commencé à courir, c’était les filles de l’équipe de France: Aurélia Truel, Maude Gaubert, Laurence Klein…Et quand je me suis retrouvé aux Templiers en 2011 avec elles et qu’au final, je finis 2e derrière Maude Gaubert, je me suis dit « waouuu, je suis proche de cette team là » du coup, ça m’a donné confiance et fait rêver pour continuer. Après sur les ultras, il y a eu quelques figures qui m’ont un peu servi de modèle, m’ont motivé pour trouver de nouvelles astuces pour progresser, aller plus loin dans la connaissance de moi-même, dans mes entrainements, dans ma façon de me préparer pour réussir.

Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui souhaite se lancer dans le trail ?

S’il doit y en avoir qu’un, c’est le plaisir avant tout. Le plaisir d’être dans la nature. Si c’est quelqu’un qui ne cours pas, c’est de commencer par de la marche-course pour ne pas trop se fatiguer, pas trop avoir de douleurs puis après allonger les distances. Pour quelqu’un qui court déjà et qui va basculer sur le trail, c’est de laisser le chrono et être en harmonie avec le chemin et jouer avec les éléments.

As-tu des astuces ou des habitudes particulières pour la récupération ou l’alimentation ?

Oui bien sur puisqu’en faite tout ce que l’on fait, on le fait mieux en routine pour éviter de réfléchir à la problématique. Une fois que c’est rentré en routine, c’est plus facile à faire et on gagne du temps. Pour la récupération, je suis adepte des étirements à distance des séances, bien respecter son sommeil. Pour l’alimentation, manger de tout sans se restreindre mais en limitant les quantités pour respecter son poids de forme pour un meilleur équilibre poids/puissance. Après, j’ai la routine d’avant course pour l’alimentation ou je vais enlever les fibres 2 à 3 jours avant pour ralentir mon transit intestinal et ne pas être perturbée pendant ma course. Pour le sommeil, petit astuce: mettre mon réveil à sonner à 22h pour le mettre à 22h30 puisque j’ai observé que mon train du sommeil est à cette heure là. Du coup, c’est plus facile car je suis déjà dans mon lit à cette heure là, je saute dans le train du sommeil et je fais une bonne nuit. Pour les entrainements, le coté physique, la petite routine de la veille de course ou je me fais 20’ de footing, en tenue de course avec mon sac chargé pour m’assurer que tout est ok.

Peux-tu partager une anecdote insolite ou un souvenir mémorable vécu pendant une course ?

Alors, je ne suis pas très bonne pour raconter des histoires, du coup, une anecdote insolite, je ne sais pas bien quoi raconter puisque forcément il y en a mais que je ne les ai intégrées, mais, il y en a une qui n’est pas forcément une anecdocte : quand j’ai couru pour la première fois la Diagonale des Fous, c’était le clair de lune et quand je suis arrivé au Piton Textor, en haut de la première montée, il y avait un super clair de lune et on voyait le Piton des neiges au loin et entre les deux, il y avait une mer de nuages, c’était magnifique et cette image, je l’ai encore en tête. Quand je veux insuffler des images positives dans mes séances de relaxation, je me sers encore de cette image que j’ai vu avec les émotions que j’ai traversé à ce moment là.
Il y a quand même cette anecdocte qui n’est pas tout à fait un trail car c’était un challenge par équipe au Brésil avec des angevins. Je faisais la partie course à pied, j’ai perdu la trace et je me suis retrouvé perdu dans Rio. J’étais toute seule, je ne parlais pas le portugais, je n’avais pas d’argent, pas de téléphone et par chance, un autre coureur s’est aussi perdu, on s’est retrouvé, lui parlait un peu le portugais, a demandé de l’argent, on a pu prendre le bus pour revenir au point de départ de la course. Je me suis rendu compte, avec cette histoire, qu’il fallait partir avec un peu d’argent et pas être minimaliste comme j’aime l’être.